dimarts, 27 de novembre del 2007

La cour d'assises aborde les errements de l'enquête sur la mort de M. Erignac

La cour d'assises aborde les errements de l'enquête sur la mort de M. Erignac
LE MONDE 26.11.07 11h08 •



n entrant, lundi 26 novembre, dans sa troisième semaine, le procès d'Yvan Colonna aborde les errements de l'enquête sur l'assassinat du préfet Claude Erignac. Les policiers de l'antiterrorisme, dirigés par le commissaire Roger Marion d'un côté, les gendarmes et le préfet Bernard Bonnet, de l'autre, et les juges du pôle antiterroriste de Paris, au milieu, ont souvent agi en ordre dispersé. A tel point qu'en 1999, un rapport de l'Assemblée nationale sur la sécurité en Corse fustigeait la "guerre des services et les logiques personnelles" qui avaient prévalu pendant les dix-huit mois d'enquête sur l'assassinat du préfet.
Huit ans après, les mêmes protagonistes se succèdent devant la cour d'assises spéciale de Paris à partir de lundi 26 novembre, et jusqu'à mercredi : le préfet Marion, ancien patron de la division nationale antiterroriste (DNAT), l'ancien préfet de Corse, M. Bonnet, et les juges Jean-Louis Bruguière, Laurence Le Vert, et Gilbert Thiel.
S'il s'est fourvoyé pendant plusieurs mois sur une mauvaise piste, dite "piste agricole", M. Marion n'en revendique pas moins d'être à l'origine de l'arrestation du commando. Lorsque les policiers procèdent le 21 mai aux premières interpellations de ceux qui déclareront quelques heures plus tard être les auteurs de l'assassinat, M. Marion dispose de relevés téléphoniques qui ont permis à la DNAT d'établir la présence près des lieux du crime, le soir du meurtre, des suspects appréhendés.
Roger Marion a raté Yvan Colonna : "Avant les aveux de ses complices en garde à vue, nous ne disposions d'aucun élément qui le mettait en cause; il n'avait pas de téléphone", se justifie-t-il. Mais le policier assure qu'il avait demandé qu'on "resserre le dispositif de surveillance" mis en place autour de M. Colonna et de son frère. Par la suite, M. Marion s'est défendu en accusant le commissaire Démétrius Dragacci, ancien patron du service régional de police judiciaire (SRPJ) d'Ajaccio, originaire de Cargèse, d'avoir alerté la famille Colonna.
Au moment où se dénoue l'affaire Erignac, M. Bonnet est empêtré dans un autre dossier : l'incendie de la paillote Chez Francis. Incarcéré à la prison de la Santé, il tente de se faire entendre. Voilà plus de six mois, clame-t-il, qu'il a livré la plupart de ces noms au juge Jean-Louis Bruguière, via le procureur de la République de Paris, Jean-Pierre Dintilhac.
"ON VOUS A MENTI"
Pendant l'été 1998, un informateur anonyme a fourni à Bernard Bonnet des renseignements précis sur l'assassinat du préfet Erignac et certains de ses auteurs supposés. Ce mystérieux informateur que M. Bonnet a baptisé "Corte" lui livre une partie du commando, dont son chef Alain Ferrandi, et un certain "Colonna de Cargèse". "Mais là, il y avait une erreur de prénom", admet M. Bonnet lorsqu'il est interrogé par les députés en septembre 1999. M. Bonnet – qui "doute" aujourd'hui de la culpabilité d'Yvan Colonna – ne comprend pas pourquoi le juge Bruguière n'a pas utilisé ces informations.
"Je n'ai jamais été destinataire des notes Bonnet. Jamais. Et si l'on vous a dit le contraire, c'est qu'on vous a menti", s'agace le juge, questionné lui aussi par les députés en septembre 1999. M. Dintilhac lui a bien transmis "verbalement" des informations dont il a refusé de lui indiquer l'origine. "Je me suis même posé la question de savoir si la gendarmerie n'était pas derrière. Je devais donc, dans un contexte délicat, évaluer la validité d'une information dont je ne connaissais ni l'origine, ni le canal", a expliqué M. Bruguière aux parlementaires. Les députés relevaient dans leur rapport d'enquête les "graves carences dans le fonctionnement de la police judiciaire", les "rivalités diverses" à l'origine "de rétentions d'informations qui s'expliquent avant tout par la volonté de chaque service d'aboutir avant les autres".
Yves Bordenave