diumenge, 16 de desembre del 2007

Roger Marion attendu de pied ferme par la défense... et l'accusation.


Si la Cour d'assises spécialement composée attend avec impatience la déposition de Roger Marion aujourd'hui, c'est parce qu'elle permettra peut-être de connaître la vérité sur un raté majeur de l'enquête : la « non-interpellation » d'Yvan Colonna. Un raté que Marion a expliqué par mille raisons. Mais, visiblement, jamais la bonne.


« Yvan Colonna a dû être mis en cause pendant la journée du samedi. Le dimanche matin, nous sommes intervenus à son domicile, où il n'était plus. » Auditionné par une commission d'enquête parlementaire en 1999, Roger Marion ne s'embarrasse pas de détails. Colonna s'est enfui... banal : juste une bête question de date. Sauf que. C'est la première embûche sur la route des versions successivement données par Marion pour élucider le foirage de l'interpellation de Colonna. : Yvan Colonna n'a pas été mis en cause dans la journée du samedi 22 mai 1999 mais bien dans la nuit de vendredi à samedi, par Valérie Dupuis, la compagne de Didier Maranelli. A minuit quinze précisément, celle-ci va expliquer aux policiers qu'au matin du 7 février 1998, le lendemain de l'assassinat, Yvan Colonna a rendu visite à son compagnon « pour la première et la dernière fois ». Elle est certaine que les deux hommes sont mêlés à l'affaire. Pourtant Marion ne bougera pas. Et Colonna disparaît « aux chèvres » dans la journée de samedi. Lorsque les hommes de la Dnat se présentent à son domicile le dimanche, il s'est envolé. Le timing ne colle décidément pas. Est-ce la raison pour laquelle Marion ne va pas tarder à donner une autre version des faits ? Toujours est-il qu'il assurera ensuite que si l'assassin présumé du préfet Erignac a pu prendre la clé des champs, c'est à cause d'une indiscrétion. En clair : le commissaire Démétrius Dragacci, lui aussi originaire de Cargèse, aurait « mangé le morceau » et confié au père d'Yvan, Jean-Hugues, l'imminence de l'arrestation de son fils. Encore raté ! En Corse, nul - à part Marion - n'ignore que « Dimi le Grec » et le patriarche Colonna ne sont plus adressé la parole depuis près de dix ans... Qu'à cela ne tienne : Marion charge ensuite le commissaire Eric Battesti, futur directeur régional des RG en Corse, et connaissance de Pierre Geronimi, le compagnon de Christine Colonna. Las : ça ne colle toujours pas. Dans son livre paru aux éditions du Seuil (« On m'appelle Eagle Four »), le « Beau Roger » donne une dernière version : si Colonna ne faisait pas partie, le vendredi 21 mai 1999, de la première vague d'interpellations, c'est parce qu'il « n'avait pas de téléphone. » Mais le grand flic se rattrape : le samedi 22 mai, vers 20 h 40, il demande à son adjoint resté à Ajaccio de "resserrer immédiatement le dispositif de surveillance" autour de Colonna, parce que Maranelli "commence à s'attabler". Le dimanche, à 6 heures, heure légale, les policiers de la Dnat ne parviennent pas à mettre la main sur Yvan. "J'ai été abasourdi d'apprendre que, sous la direction de mon adjoint Jean-François Lelièvre, mes hommes s'étaient présentés au domicile d'Yvan et ne l'avaient pas trouvé », explique Marion dans son bouquin. Pire : « les frères Colonna n'étaient pas sous surveillance comme je l'avais réclamé ». L'adjoint de Roger Marion à l'époque s'appelle Jean-François Lelièvre. Et il risque bien de ne pas apprécier cette dernière sortie. Car selon plusieurs témoins, ce dernier, une fois remonté à Paris pour suivre le cours de la procédure, aura une entrevue plutôt orageuse avec son patron sur les ratés de l'arrestation. Le policier serait, aujourd'hui encore, ulcéré par ce ratage. Ca tombe bien : il viendra demain expliquer à la barre les dessous du raté qui permettra à Colonna de mener une longue cavale...


Antoine Albertini